GONESSE 95500


Inscription révolutionnaire - Eglise Saint-Pierre Saint-Paul - Rue du Général Leclerc


En levant les yeux vers le tympan du portail central, juste au-dessus de la statue de Saint-Pierre, l'observateur attentif pouvait discerner une inscription pour le moins inhabituelle au fronton d'une église. Quelques bribes d'une phrase, quelques lettres à peine lisibles laissaient deviner ces mots: "Le peuple français reconnoît l'existence de l'être Suprème et l'immortalité de l'être". En caractères plus sombres, on lisait aussi: "Temple de la Raison". Recouverte d'un badigeon destiné à en effacer jusqu'au souvenir, l'inscription est peu à peu réapparue sous la peinture écaillée, faisant ainsi ressurgir du passé l'une des pages les plus mouvementées de notre Histoire. Novembre 1793, ou plutôt brumaire an II de la République. Débarrassé de ses rois, le pouvoir révolutionnaire entend aussi détruire tous les symboles de l'ancien régime. Le culte catholique est supprimé et on tente alors d'imposer une religion nouvelle dont la première cérémonie a lieu à Notre-Dame de Paris, devenue Temple de la Raison. A Gonesse, on s'empresse de suivre le mouvement. La municipalité entend bien célébrer la divinité républicaine, les victoires militaires ainsi que les maîtres à penser de la Révolution, Jean-Jacques Rousseau et Marat. En janvier 1794, le curé Jollivet est chassé "du temple qu'on a consacré à la Raison et à la Liberté". Cette nouvelle religion tourne souvent à la mascarade. Robespierre ne l'apprécie pas et propose à la Convention d'officialiser un autre culte. La loi du 18 floréal an II (7 mai 1794) en jette les bases et l'on s'emploie à le rendre populaire en instituant la fête de l'Etre Suprème. En prévision de cette cérémonie dédiée à l'Eternel, on peint la fameuse formule au portail de Saint-Pierre. La fête a lieu le 20 prairial (8 juin 1794). On y entend de pompeux discours entrecoupés de chants patriotiques. Quelques semaines plus tard, Robespierre monte à l'échafaud entraînant la fin des cultes nouveaux. Le 30 octobre 1795, la municipalité de Gonesse, désormais consciente que "les yeux des bons citoyens sont chaque jour blessés de voir subsister l'inscription au-dessus de la porte du Temple", charge le citoyen Brunet de la recouvrir moyennant 200 livres. Moins d'une semaine après, le tympan est repeint. Les passions révolutionnaires éteintes, l'église a été bien vite rendue au culte catholique. Ce bref épisode, paradoxalement, a eu des conséquences heureuses : grâce au zèle des fidèles Républicains, on avait achevé le dallage de l'église et conservé l'orgue pour accompagner les hymnes révolutionnaires. Ils nous laissent aussi, par cette inscription aujourd'hui restaurée, un souvenir d'une extrème rareté.

Date et heure de prise de vue : 6-06-2010 - 8h37
Photo numérique : 4058


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