Saint-Gervais-sur-Mare 34610
inventaire du patrimoine historique
Commune du Parc Naturel Régional du Haut Languedoc, Saint-Gervais-sur-Mare est l'un
de ces paisibles villages de moyenne montagne de l'Hérault, dans cette France profonde
où il fait bon vivre.
En hiver, le climat y est rude et la neige recouvre la nature d'un magnifique manteau, mais en
été le soleil méditerranéen fait son apparition et sous le cri
strident des cigales, fait fondre inexorablement le bitume de ces petites routes pittoresques
qui gravissent les pentes schisteuses au sortir de l'agglomération.
On discernera au nord sur la crête, l'ancien village primitif qui fut
déserté au Moyen Age et dont ne subsistent que quelques éléments
du fameux clocher de Nayran, identique à celui de l'an mille qui surmonte encore
fièrement l'église du bourg actuel.
A l'ouest, notre regard ne peut manquer les impressionnantes cimes gneissiques de l'Espinouse,
point culminant de la région où flâne le mouflon du Caroux dans la bruyère.
De là haut, le regard embrassera notamment vers le sud un panorama unique allant de la
mer aux Pyrénées.
Bien que la Mare soit le fleuve principal qui borde l'agglomération au nord, c'est
surtout le Casselouvre qui traverse le village médiéval et le sépare en
deux.
On raconte qu'autrefois, quand la rivière était en crue et les fragiles
premiers ponts emportés par les eaux tumultueuses, les hommes forts du village jetaient
le pain d'une rive à l'autre pour pouvoir le faire cuire car le seul four banal
autorisé était situé près de l'église sur la rive droite.
Le long de ses ruelles étroites, tout un pan de l'histoire de Saint-Gervais resurgit
lorsque l'on observe ces vieilles demeures aux frontons gravés ou armoriés avec
leurs passages pavés de calades et leurs vieux puits devenus désuets que le
modernisme hélas transforme peu à peu.
Au sein de cette province viticole, Saint-Gervais était autrefois un important centre
artisanal où l'on confectionnait, avec les jeunes tiges des nombreux châtaigniers
de la région, des cercles dont en entourait les barriques pour les faire rouler.
La corporation des cercliers, qui a compté en son temps jusqu'à 160 artisans
dans le village était la plus importante.
Mes arrières grands-parents s'étaient d'ailleurs vu attribuer, comme celà
était d'usage dans le pays, un joli sobriquet, celui de "Barrouls" (rouleurs de
barriques), surnom qui leur venait sans doute de leurs parents et qui est parvenu
jusqu'à mes oreilles étonnées par une vieille dame centenaire qui m'avait
pris pour l'un des mes aïeux...
Si l'on nomme le châtaignier, on ne peut passer outre son fruit omniprésent, qui
une fois séché et décortiqué constituait le châtaignon,
denrée de base grâce à qui jadis on ne connut guère de disette.
A côté de ces fruits des bois il faut citer aussi les délicieux champignons
sauvages qui rendirent une célébrité telle à Saint-Gervais que
l'on appelât bien vite et très simplement tous ses habitants les "Coamels"
(champignons en occitan).
Une importante activité saint-gervaisienne, qui hélas également disparut,
fut celle des cloutiers. En effet, dans tout ce district minier, où la matière
première abondait (charbon et fer), il était facile de fabriquer des clous en
quantité plus ou moins importante.
L'on fabriquait les modèles les plus divers, du clou utilisé pour la
maréchalerie à celui de charpentier en passant par le clou décoratif
à large tête qui enjolivait les si belles portes anciennes dont trop peu sont
parvenues jusqu'à nous.
Toute cette activité séculaire malheureusement disparut au lendemain de la
dernière guerre.
L'ultime industrie à décliner fut enfin celle de la mine. Triste destin
qu'allaient connaître vers la fin des années 80 les mines de charbon qui seules
perduraient jusqu'alors.
Un parcours rapide dans les environs immédiats de Saint-Gervais dévoile encore
par endroits la présence de vieux terrils, témoins de cette activité
aujourd'hui révolue.
Pour l'amateur en géologie, Saint-Gervais restera cependant toujours le paradis par
excellence. Un coup d'oeil sur la récente carte géologique de Bédarieux
au 1/50 000e, ayant Saint-Gervais exactement pour centre, laisse apparaître une
complexité et une variété lithologique qui en fait l'une des plus
laborieuses de France à étudier.
En effet, pratiquement tous les étages géologiques y sont
représentés et quasiment tous les types de roches (ignées, et
métamorphiques) existent dans son périmètre.
En ce qui concerne les minerais, l'on y a extrait autrefois, outre le fer et le charbon
déja cités, le plomb, le cuivre, le zinc et les phosphates. Il y eut aussi
des fours à chaux, des tuileries, des marbrières, de la bauxite, de la baryte
et même l'or, l'argent et l'uranium connurent leurs heures de gloire.
Si nous rajoutons à celà les fossiles (trilobites, fougères, mollusques,
dinosaures...), les sources thermales et minérales, on ne s'étonnera pas de
trouver sur les anciens guides touristiques la présence d'un musée de
géologie.
Malheureusement ce petit établissement sympathique a disparu il y a quelques
années, depuis le décès de son instigateur l'abbé Boulanger,
curé d'Andabre et géologue de renom, à qui nous rendons hommage ici, et
à qui je dois, comme tant d'autres qui le suivaient inlassablement, ma passion pour les
roches et la nature.
Ne cherchons plus la gare de ce petit bourg accueillant, qui maintenant a disparu au profit
d'une gendarmerie moderne. Elle se situait sur l'ancien tracé d'Andabre à
La Tour-sur-Orb qui se raccordait avec la ligne Paris Béziers via Clermont-Ferrand.
Elle desservait, jusque dans le début des
années 50, de nombreuses bourgades et zones d'activités qui peu à peu ont
du fermer leur portes. Telles les fonderies de Graissesac ou la fabrique de cloches de
Castanet-le-Bas où l'on y confectionnait il y a encore peu de temps les sonnailles,
petites clochettes cuivrées et typiques destinées aux chèvres et aux
moutons.
Nous pourrions énumérer encore longtemps les charmes de cette petite
contrée méridionale, comme par exemple en citant le vieux pont de Trois Dents,
qui enjambe avec ses trois arches majestueuses la Mare que surveille depuis des
millénaires le rocher de la Baragogne, ou encore l'antique menhir en micaschiste du
col de la Pierre-Plantée, situé sur un ancien chemin gaulois qui de là
redescend dans la vallée ou grimpe encore vers la mystérieuse forêt de
mélèzes des Ecrivains Combattants.
Laissons à présent la place aux images avec leurs explications qui ne seront pas
sans surprendre plus d'un des villageois ou des touristes qui ont la chance de
résider ou de passer seulement dans cet agréable terroir qui demeure
assurément parmi les plus beaux de notre pays.